Quand l'école de Palo Alto fait dormir les enfants, apaise les mamans et les papas. Surtout les mamans...
On notera que deux séances ont suffi pour régler le problème de sommeil d'une petite fille, sans que j'ai besoin de la voir. En effet, en tant que thérapeutes systémiciens, nous évaluons le système pertinent: Qui a un problème? Qui se plaint? Qui souffre? Qui fait quoi? Qui dit Quoi? Nous ne recevons pas forcément en séance la personne qui porte le symptôme.
En l'occurrence, c'est la maman qui n'en peut plus; C'est elle le levier de changement avec qui je souhaite travailler. Laissons la petite fille à ses jeux...Et rentrons de plein pied dans la thérapie indirecte Palo Altienne.
Christina, maman de deux enfants de 4 et 6 ans, fait appel à nouveau à moi, un beau matin; En effet, je l'avais déjà accompagnée pour des problèmes relationnels au sein de sa famille. Je la sens épuisée et survoltée.
Christina, pourtant bien au fait de la thérapie systémique et stratégique, pense que je vais la voir avec son bout de chou de 4 ans; Oui c'est sa fille qui ne veut pas dormir après tout, c'est elle le problème! Après un petit recadrage, je lui explique que nous allons voir cela tranquillement toutes les deux, je veux savoir ce qui se passe exactement.
Première séance
(Extraits)
Thérapeute: Bonjour Christina, alors que se passe-t-il? Expliquez-moi...
Christina: Je suis à bout! Ma fille de 4 ans ne veut plus dormir! Elle fait une crise tous les soirs, pleure, crie, se relève, empêche son frère de dormir! Cela dure des heures! Aidez-moi!
Thérapeute: Ok...Et comment s'appelle la "diablotine" qui ne veut plus dormir?
Christina: Eléonore
Thérapeute: Et cela dure depuis combien de temps?
Christina: Depuis un mois environ
Thérapeute: Il s'est passé quelque chose de spécial dernièrement?
Christina: Pas vraiment...Ah si son père a trouvé un nouveau travail depuis six mois, il est moins souvent à la maison; Je dois être encore plus présente.
Thérapeute: D'après vous, est-ce que cela a contrarié votre petite fille? Ses habitudes ont-elles été perturbées?
Christina: Oui un peu, mais cela ne l'empêchait pas de dormir. C'est seulement depuis quelques semaines.
Thérapeute: Racontez-moi, comment se passe le rituel du coucher? Vos enfants dorment-ils dans la même chambre?
Christina: Oui ils dorment ensemble, et son frère dort déjà lorsqu'elle commence sa crise; Il a le sommeil lourd.
Thérapeute: Donc ces crises ne réveillent pas son frère?
Christina: Non pas vraiment, encore heureux! Mais je l'appréhende. Faites quelque chose pour qu'elle dorme, je n'en peux plus!
Thérapeute: Racontez-moi le rituel du coucher...
Christina: Chaque soir, je raconte une nouvelle histoire avec des personnages que j'ai inventés; Les enfants sont dans ma chambre pour les histoires. Ensuite on chante quatre chansons, et ils vont se coucher dans leur lit.
Thérapeute: Ah oui quatre chansons? Vous donnez de votre personne! Et avant cette crise, Eléonore s'endormait sans problème?
Christina: C'était déjà un peu compliqué, parfois elle me rappelait mais s'endormait tout de même. Maintenant quand je lui dis "Bonne nuit à demain", elle me dit "Non je veux pas dormir! Na!" Elle crie et elle me suit dans tout l'appartement!
Thérapeute: Et vous faites quoi?
Christina: J'ai tout essayé! Au début, je la raisonnais, je négociais, j'étais douce, je restais plus longtemps avec elle. Puis au bout d'un moment, je m'énervais, je criais! Et rien n'y faisait...Parfois même, excédée, je la forçais à aller marcher avec moi dehors! Mais rien n'y faisait, je vous le dis, j'ai tout essayé!
Thérapeute: Oui, on dirait bien qu'Eléonore a pris le contrôle de la relation, et plus vous lui dites de dormir, et plus elle vous dit non, n'est-ce pas?
Christina: Oui je m'en rends bien compte...Mais c'est plus fort que moi, elle me fait sortir de mes gonds!
Thérapeute: "La diablotine" est sortie de sa boîte, et cela n'épuise que vous qu'elle ne dorme pas; Les enfants ont des ressources incroyables! Et que fait son papa, il intervient? Il vous laisse gérer la crise toute seule?
Christina: Oh comme d'habitude, je gère tout toute seule! De toute façon, elle ne veut pas que son père la couche, elle se braque encore plus et répète en boucle: "Je veux maman!" et c'est encore pire, alors je cède.
Thérapeute: Je comprends votre épuisement; C'est parfois bien ingrat d'être une maman?
Christina: Oui, tellement...
Thérapeute: Bon ok, on y va? Vous êtes prête pour le 180°? (Christina a déjà travaillé avec moi sur cette méthodologie de l'école de Palo Alto, et je peux me permettre d'être plus directe avec elle.) Pensez-vous avoir encore un peu de courage pour renverser la vapeur? Pour qu'enfin ce bras de fer cesse?
Christina: Oui bien-sûr, c'est pour cela que je reviens vers vous, j'ai hâte de m'y mettre!
Thérapeute: Pour commencer, Christina, et je vous demande de bien garder cela en tête, si Eléonore ne dort pas, nous admettons l'idée et le postulat qu'elle a une bonne raison de ne pas dormir, inconsciemment s'entend, vous me suivez?
Christina: Oui tout à fait
Thérapeute: Secundo, vous vous rappelez que plus je veux prendre le contrôle sur une fonction physiologique, naturelle et spontanée, le sommeil en l'occurrence, plus je perds ce contrôle et moins le sommeil vient?
Christina: Oui
Thérapeute: Donc, nous sommes d'accord que plus vous demandez à votre fille de dormir, alors que le sommeil ne vient pas, moins elle veut dormir, plus elle dit Non?
Christina: Oui
Thérapeute: Et finalement dans cette logique, cela parait presque raisonnable qu'elle dise non, puisque que le sommeil ne vient pas? (J'amène pas à pas la prescription très paradoxale qui va suivre, pour tout bon sens commun)
Christina: Heu...Oui
Thérapeute: Il va donc vous falloir appliquer la prescription du symptôme: "Non, ne dors pas!"
Christina: Ah oui! Quand même!
Thérapeute: Je vous rassure, vous n'allez pas lui dire comme cela; Nous allons l'adapter de façon écologique et pédagogique pour votre petite fille, afin qu'elle apprivoise le sommeil, et plus vertueux encore, nous allons faire en sorte que le sommeil devienne un ami, et non pas une punition.
Donc au moment du coucher, vous lui direz: "J'ai compris que tu n'as pas sommeil et que le petit train a du retard...Viens dans le salon l'attendre; Je vais mettre une petite sonnerie, et dès que tu l'entends sonner, c'est le signal que le petit train est enfin arrivé. Tu pourras retourner te coucher et dormir, mais pas avant."
Je propose 15 mn pour le timer, Christina préfère 30 mn, tant elle appréhende que sa fille refuse de dormir; Le prochain rdv est pris dans 15 jours, avec la demande de bien observer les réactions de sa petite fille.
Dans cette inter-séance, laissons Palo Alto, tel le marchand de sable, jeter sa poudre de sommeil sur les yeux d'Eléonore.
Je demande au préalable à cette maman survoltée, de faire quelques lettres de colère afin de vider cette charge émotionnelle.
Deuxième séance
(Extraits)
Thérapeute: Bonjour Christina, alors comment s'est passée cette prescription?
Christina: Ça a marché! Je lui ai dit: "C'est pas bon de se forcer à dormir, tu ne vas pas dans ton lit tout de suite. Tu n'es pas encore prête, viens dans le salon sur le canapé."
Thérapeute: Que répond-elle?
Christina: "Non! je veux pas! Je vais dans mon lit!"
Thérapeute: (Rire) C'est prodigieux! Et alors?
Christina: Je n'ai rien lâché et je lui ai expliqué que j'avais bien compris que le sommeil ne venait pas, que le petit train avait du retard, et qu'elle devait l'attendre sur le canapé jusqu'à ce qu'elle entende la sonnerie. J'ai mis le timer sur 30 minutes, elle s'est allongée sur le canapé et s'est racontée des histoires pendant que je vaquais à mes occupations. Je ne suis pas restée avec elle.
Thérapeute: Très bien. Et comment s'est passé le coucher?
Christina: Elle ne s'est pas faite prier pour aller se coucher! Je lui ai fait un bisou et suis sortie de sa chambre....Elle ne m'a pas rappelée; Elle a mis du temps à s'endormir, mais je n'ai rien entendu, tout était silencieux, enfin!
Thérapeute: Et les autres soirs?
Christina: Même chose. Le deuxième soir, je lui dis: "Non, tu ne vas pas dans ton lit! Tu vas dans le salon!" Elle s'allonge dans le canapé et se raconte des histoires, toute contente. Et puis au fur et à mesure du temps, Eléonore a compris que c'était un nouveau rituel. Elle veut bien ne pas se coucher tout de suite, mais elle me dit: "Juste une minute maman dans le salon!", mais je reste ferme. Je suis néanmoins passée à 15 minutes.
Thérapeute: Corrigez-moi si je me trompe, mais je vous sens encore légèrement survoltée lorsque vous lui demandez d'attendre le petit train? Non seulement, l'idée est d'apaiser le coucher mais aussi d'apprendre à Eléonore à apprivoiser le sommeil. Je comprends bien que toutes ces dernières semaines vous ont épuisées, mais néanmoins, nous ne sommes pas dans une punition.
Christina: Oui vous avez raison, j'ai peut-être un peu trop expédié la prescription.
Thérapeute: Pour la suite, vous qui aimez inventer des histoires à vos enfants, vous pourriez peut-être rester avec elle sur le canapé, ne serait-ce que 5 minutes, et lui parler du petit train...Vous pourriez lui dire: " Tu sais pourquoi le petit train a du retard? Et bien figure-toi qu'un passager avait oublié sa valise dans la gare, et il a fallu l'attendre. Il est très gentil ce petit train...Tout le monde le remercie car il veille sur nous; Peut-être pourrais-tu le remercier d'être en retard car il est si gentil?"
Je fais confiance à votre créativité...
Feedback un mois plus tard
Lors d'une nouvelle de demande de Christina, pour son fils cette fois-ci, je demande des nouvelles du "marchand de sable" Palo Altien. Tout se passe bien. La prescription du symptôme est devenu un nouveau rituel du coucher pour Eléonore. Christina a pris du plaisir à inventer de belles histoires de petit train, et chaque soir, Eléonore demande: "Je veux le minuteur!" et va dans le salon.
Elle a su apprivoiser son sommeil en retrouvant l'apaisement et la compréhension sereine de sa maman.
Reprendre le contrôle pour les parents, ne consiste pas, dans une escalade symétrique avec leurs enfants, à rentrer dans un bras de fer; Celui-ci est aggravant. Il s'agit d'épouser le mouvement en le ritualisant stratégiquement, et en le renforçant de façon écologique pour l'enfant.
L'école de Palo Alto s'apparente complètement à l'Aïkido, cet art martial qui utilise la force de l'adversaire en lui renvoyant.
Elle intègre totalement cette devise: Décourager l’attaque et non pas vaincre son adversaire.
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